#37 Régis of Zapruder/Odüm

- 26/03/13 17:33

zaprude

À quel âge avez-vous commencé à chanter ? Qu’est-ce qui vous a donné envie de le faire ?

Si l’on excepte les chansons d’Alain Souchon fredonnées sous la douche j’ai dû commencer à m’y mettre vers le début du lycée, soit 14-15 ans. Ce qui m’a donné envie de m’y mettre c’est la découverte du Death Metal, notamment avec Opeth et Gojira. Cette voix Death me fascinait et je m’exerçais à chanter comme Akerfeldt, qui est toujours ma référence. Puis avec des amis nous avons formé un groupe, ce qui m’a poussé à m’exercer davantage, même si notre projet n’allait pas bien loin et qu’on était bien à l’arrache !

Avec le chant vient l’écriture, écrivez-vous vos propres textes ? Si oui, sur quoi aimez-vous écrire ?

Je ne conçois pas le chant sans le texte et je refuse de chanter un texte qui ne prend pas sens pour moi et qui n’entre pas en résonance avec ce que je ressens et pense. De fait j’ai toujours écrit mes textes, que ce soit avec Zapruder ou Odüm.

Etre dans deux groupes fait que j’écris sur des thèmes différents pour l’un et pour l’autre. Dans Zapruder les textes sont poétiques, très élaborés et d’ailleurs on partage souvent la plume avec Etienne (guitare) pour être assurés d’un rendu superbe. J’écris à partir du français bien souvent et il traduit en anglais, ce cher professeur nous garantissant une traduction littéraire et affinée. Il arrive qu’il écrive lui-même un texte de A à Z mais du moment qu’il me touche il n’y a aucun problème, l’important est de pouvoir le restituer sincèrement en chantant.

Pour les thématiques Zapruder joue une musique très brute, moins technique qu’ Odüm et cela m’inspire souvent des thèmes en rapport avec le monde, la société contemporaine et les problématiques que pose cette dernière. Sur « Falling Like Dead Snakes » les textes parlent de la nécessité de soutenir un combat dans sa vie, et de ne pas se laisser aveugler par de fausses vérités. « We Carry Just Enough To Play » de son côté est une profession de foi de notre part où nous affirmons notre volonté de faire de l’art non pas uniquement pour le beau, mais surtout pour transmettre des messages, de tout donner pour faire partager nos textes et notre musique. Avec Odüm c’est assez différent puisque la complexité de la musique invite à élaborer des concepts précis, et je pars souvent dans des textes très métaphoriques et symboliques, avec une dimension psychédélique forte, à l’instar de Tool, dont j’adore l’univers.

Comment choisissez-vous les titres de vos morceaux ?

C’est paradoxalement une partie que j’adore et déteste car pour moi beaucoup de choses passent par le titre du morceau. Il doit soutenir le sens en lui-même mais ne pas trop en dire non plus, et j’adore choisir un titre qui en jette phonétiquement et sémantiquement, mais qui comporte également une part de mystère qui donne envie de le comprendre en détail et d’ausculter la musique qu’il représente.

Quels sont vos chanteurs modèles ?

Comme je l’ai dit plus haut j’ai été fasciné par les voix Death avec ma découverte d’Opeth. Rien n’a changé et je considère toujours qu’ Akerfeldt est le meilleur chanteur de Death qui existe. Il a en plus une capacité à passer du chant clair au growl sans problème, mais aussi de coller une bonne dose de frissons dans les cris aigus, qu’il a gardé de la première période plus Black Metal. Sinon Joe Duplantier de Gojira reste une référence pour moi, notamment parce qu’il dispose également d’un panel très large et qu’il a une personnalité dans sa voix, comme Akerfeldt d’ailleurs. Il a su développer son timbre et sa technique dont l’apogée est représentée sur From Mars To Sirius à mon avis. Enfin Steve Von Till et Scott Kelly sont vraiment deux chanteurs exceptionnels, à la fois dans leurs projets Folk et dans Neurosis, même si l’on sent qu’ils vieillissent sur le dernier album. Hors du Metal, j’aime beaucoup David Gilmour aussi, Jacques Brel, et j’ai dernièrement pris une méchante claque avec Willis Earl Beal, avec sa voix Soul possédée.

Quel est celui qui sort le plus du lot dans la scène française ?

Sans aucun doute Joe Duplantier. Il est bien au-dessus des autres en terme de technique et de puissance, même si Sam d’Hacride a lui aussi des choses intéressantes dans son chant. Yann Ligner de Klone est un excellent chanteur aussi, qui maîtrise à la fois le chant clair et le Scream, qu’il utilise malheureusement de moins en moins. Et je n’oublie pas Bart de Birds In Row/ Hourvari, qui a vraiment une fragilité magnifique dans la voix.

Quel est l’album qui vous a le plus marqué d’un point de vue chant ?

Ca c’est une question difficile ! Je dirai From Mars To Sirius. L’intensité et la profondeur de cet album sont décuplées par le chant, très aérien, très en phase avec l’aspect à la fois massif et planant de la musique et du son. Non mais sans déconner, je ne me lasse pas de cet album, la fin de « Where Dragons Dwell » et « To Sirius » sont en boucle bien souvent, notamment grâce au chant de Joe.

Quel frontman vous a le plus impressionné sur scène ?

Chino Moreno de Deftones. Il a une espèce d’énergie communicative énorme et pourtant, il sait la doser pour ne pas donner une impression de polichinelle comme c’est souvent le risque sur scène. Et la chemise rose j’étais sceptique mais sans rire, ça donne un cachet unique !

À qui vous a-t-on déjà comparé vocalement (en bien ou en mal) ?

J’ai eu la chance d’être toujours comparé en bien sur mon chant, les remarques sur une proximité avec un chanteur existant étant toujours positive pour moi car si cela signifie un manque de personnalité, cela veut aussi dire une technique identique, ce qui n’est pas rien. J’ai eu le droit à Joe de Gojira dont j’aime reprendre – je l’avoue – les longues envolées criées, Greg Pusciato, et Nergal de Behemoth pour le chant Death, ce qui franchement, m’a fait sacrément plaisir.

Quel a été le compliment le plus marquant que l’on a fait sur votre voix ?

Le simple fait de recevoir un compliment sur sa voix dans le milieu du Metal est un plaisir. J’ai vraiment la sensation que le Metal est une musique à riff et que le chanteur, malgré le mythe du « il chope plus » (ce n’est pas un mythe), est relégué au second plan, le public étant fana de guitares, de batterie surtout. Après, on sent que face à des groupes comme Hacride, Klone, Gojira, les gens sentent qu’il y a une différence, un vrai travail de la part du chanteur qui ne se contente pas simplement de hurler dans son micro. Je crois que finalement, le meilleur compliment qu’on m’ait fait c’est de dire que ma voix sortait des sentiers battus et qu’il y avait vraiment de la technique, deux choses qui sont primordiales dans ce que je recherche et travaille.

Avec qui aimeriez-vous faire un featuring ?

Ah le featuring ! Déjà j’aimerai en faire un qui ait un intérêt parce que souvent, j’entends des feat avec un grand nom mais peu d’intérêt. Genre celui de Gojira avec sur The Way Of All Flesh avec Randy de Lamb Of God, aucun intérêt pour moi.

Pour te répondre plus précisément, ce serait à la fois des chanteurs que j’admire type Akerfeldt, Steve Von Till ou d’autres avec qui il y aurait un réel intérêt, différent du « ouah j’ai chanté avec un tel ! ». Genre Julie Christmas, qui apporterait un gros plus, Bart de Birds In Row ou Niko de Drawers, qui est à la fois un ami et un connard (salutations saucisse).

Quel est le morceau de votre groupe où vous vous sentez à votre paroxysme ? Celui qui vous rend le plus fier ?

Aucun à vrai dire, j’essaye de me donner à fond sur chaque morceau, à la fois parce que je suis comme ça, mais aussi parce que sinon je me ferai chier sur scène.

Donnez-vous un traitement spécial à votre voix avant un concert ? Quel est votre pire souvenir de concert ?

Avec notre ingé son Timothée Grivès on expérimente quelques petits effets type du delay, de la reverb, jamais trop à vrai dire. Sinon la saturation parfois aussi. Mais ce n’est pas primordial, j’aime le naturel.

Le pire souvenir de concert que j’ai eu est aussi le meilleur. Avec mon groupe Odüm on participait au tremplin d’un festival appelé le Rock Xtrem Fest, avec à la clef enregistrement de deux jours dans un petit studio et première partie de la tête d’affiche du fest, qui était Kronos. Quand on a joué, on était sûrs de perdre car on n’était pas fiers de notre prestation, et du coup on s’est mis une race digne de Depardieu. À l’annonce des résultats, quand on a entendu Odüm, on a à demi décuvé, mais pas totalement, et du coup, on a ouvert pour Kronos plutôt pas frais, et moi je faisais ce dont je te parlais plus haut, le polichinelle, et un mec m’a dit qu’on aurait cru voir un singe courir partout et se foutre la gueule contre les amplis. Du vrai spectacle.

Avez-vous des conseils à donner aux jeunes qui veulent s’aventurer comme frontman ?

Ce terme de frontman me dérange un peu, car ça peut très bien ne pas être le chanteur, c’est une question de personnalité et d’engagement dans ton groupe. Si j’ai un conseil à donner pour être frontman c’est de s’accrocher et de se donner à fond pour son groupe, quitte à avoir l’impression d’être seul parfois, ou de s’engueuler tout le temps avec un autre membre, parce que lui aussi est à fond ha ha ! Sinon pour un chanteur, juste de ne pas avoir honte d’aller au milieu des bois pour s’exercer, et de ne jamais chercher la facilité, de toujours viser plus dur que ce que tu sais faire. Impossible n’est pas gaulois.

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