Crown – « The One »

- 06/04/12 14:57

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Un EP de Sludge ? Dès le départ, je me suis dit « c’est pour moi ! ». Je suis plutôt amateur du genre et de ses voisins (post hardcore, doom, stoner, etc.) et j’étais plutôt intrigué à l’idée de découvrir le premier EP de Crown, celui qui définira leur son, donnera l’envie d’aller plus loin dans l’écoute, constituera la base du projet, la pierre fondatrice de l’édifice, la première note de l’arpège, le biscuit du cheese-cake, etc. Bref, découvrir un premier effort est toujours une expérience unique et je vous avoue qu’en mettant le cd dans l’autoradio je me sentais tiraillé entre enthousiasme et inquiétude.

D’un côté la jaquette est bien foutue, le nom du combo est sobre et court, ça transpire de professionnalisme et on se sent déjà en terrain connu. D’un autre côté, le sludge est un genre fourre tout dans lequel se côtoient des groupes qui tout oppose et qui, bien souvent, peinent à se forger une identité. Je ne pouvais pas m’empêcher d’avoir cette vieille rengaine dans un coin de mon crane «  Encore un jeune groupe qui veut surfer sur la vague de revival doom / sludge ».

C’est donc avec une légère appréhension que je lance l’écoute. La première minute a bien failli confirmer mes peurs. Un doom classique, bruyant, lourd, efficace mais que l’on a déjà entendu 100 fois et qui me laisse de marbre. Et puis au fil des minutes de ce Cosmorgasm, dont je commençais à trouver le titre très présomptueux, les ambiances se complexifient et se bonifient. Le groupe trouve ses marques et impose sa patte avec des nappes bien senties et une structure imparable. Puisqu’ils ont choisit une image sexuelle, disons que les préliminaires étaient laborieux, mais l’acte en lui-même était plus qu’agréable, parfaitement exécuté et réservant quelques surprises. Les premières frayeurs sont vite oubliées et les titres s’enchainent.

Le doom est loin derrière nous, on est bien vite dans un registre post hardcore avec des lignes qui rappellent Cult Of Luna et parfois Neurosis comme sur l’intro de The One. Toutefois, Crown se permet quelques originalités en allant chercher des sons de synthés inattendus et des voix très Indus qui me font très franchement penser à des groupes comme N.E.M.E.SYS ou Tantrum. Mare vient nous offrir son lot de sons ambiants en mode musique du monde avant de verser à nouveau dans le doom pur jus. Orthodox clôt parfaitement l’EP, définitivement mon coup de cœur, une masterpiece de 9 minutes qu’il m’est impossible de vous décrire brièvement, allez plutôt l’écouter.

L’une des bonnes surprises de l’EP c’est sa durée. Le duo n’a pas voulu partir dans des titres à rallonge de 15 minutes chacun comme c’est malheureusement souvent le cas et alterne bien les ambiances et les rythmes. Bon, on parle quand même de Sludge, ce n’est pas du Punk rock et on ne s’attend pas à voir débarquer une décharge de notes sur un rythme frénétique. C’est d’ailleurs parfois ce léger manque d’audace que l’on regrettera. En 5 titres, Crown couvre tous les styles du sludge au sens large mais un manque d’homogénéité se fait sentir.

Des bonnes idées, Crown en a à la pelle, au moins autant qu’ils ont de bonnes influences et pour l’instant, ils jonglent entre les deux. A la sortie de l’écoute on ne peut que constater un peu trop de retenue, une copie rendue sans aucune rature mais un brin terne. Malgré cela mon bilan est extrêmement positif. Cette frustration est toute relative, il s’agit d’une première production et j’ai déjà tendance à faire les mêmes reproches à des formations existantes depuis 15 ou 20 ans. Dans ce genre musical où très peu de projets se montrent novateurs, Crown a déjà réussit le pari de toucher un large éventail musical et il est évident que le son va s’affiner et gagner en homogénéité sur leurs prochaines productions.

D’ici là, Crown peut se vanter de m’avoir accompagné sur le chemin de ma répète et m’avoir redonné envie de balancer du riff lourd et puissant au point que mes camarades m’ont demandé de baisser les basses et de ré-accélérer le tempo. L’EP restera donc dans la voiture et croyez-moi, il y a beaucoup d’appelés pour bien peu d’élus. Que le règne de Crown soit long, les jeunes princes que vous êtes ne tarderont pas à se faire une place d’honneur sur le trône.

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