Raein + Le DEAD PROJET + The Prestige + VALVE + Milkilo @La Gare XP (02.11.13)

- 04/11/13 22:58

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La vie me plongera dans les abysses, la musique m’en sortira. Pour la deuxième fois cette année (la première étant pour le concert de My Education) une journée bien merdique a été sauvée in extremis par les douces mélopées d’un concert au clair de Lune ; et une fois encore la société nationale des chemins de fer français est en cause. Alors que je devais être à 16h à Paris et à 18h à la Gare Expérimentale pour faire une interview rétrospective du Dead Projet avant leur dernier show (ever), j’ai été forcé d’annuler l’entrevue et je suis à peine arrivée à temps pour le premier groupe. Ce soir donc à la charmante Gare XP aux portes de Paris se déroulait le dernier concert du Dead Projet, mais l’event accueillait également les italiens de Raein, et les français de The Prestige, VALVE et Milkilo.

 

Initialement prévu à la Cantine, le groupe Milkilo s’est vu ajouté à l’affiche au dernier moment pour cause d’annulation de leur date. C’est donc ce duo basse-batterie qui ouvre à 19h50 (j’ai réussi à arriver à 45 en courant un peu) dans une Gare XP déjà très remplie, ce qui est plutôt rare pour une première première partie. Je n’ai pas l’habitude de focaliser mon attention sur la basse en concert et encore moins dans un contexte hardcore, et c’est ce qui fait que la musique du combo m’a beaucoup plu. Frais, dynamique et étonnement variée, cette prestation ayant pour point d’orgue quelques hurlements (sans micro) du batteur, fut fort sympathique et également une bonne mise en jambe.

 

Après quelques gorgées de bière, on s’attaque au seul groupe de l’affiche initiale que je ne connaissais pas et pour qui j’avais volontairement omis d’écouter les sons, histoire de me faire une idée neuve et non biaisée en direct. Autant vous dire mes petits cousins que je n’ai pas été déçu de la découverte, car VALVE a vraiment fait forte impression et ce malgré un début de set un peu poussif. En effet, dû à un sludge pas assez percutant et trop dans la répétition, bien appuyé par une épaisse fumée, l’atmosphère très black&white mais aussi très lente commençait surtout à devenir très lourde. Personnellement j’adore ce genre d’ambiance désespérée et abrutissante, qui vous fait perdre vos repères, qui vous transporte dans ce perpétuel mouvement de headbang catatonique, et où les cris angoissants du maître de cérémonie seraient comparables à la bande sonore d’une nuit en forêt. Ce soir VALVE est notre prophète, nous sommes leurs disciples, et la Gare XP est notre église.

Heureusement pour ceux qui ne sont pas fan de ce type de sludge le show s’est un peu plus intensifié par la suite, devenant plus nerveux, plus proche du hardcore chaotique, plus bordélique, plus criard, et tout simplement plus transcendant. Une vraie bonne découverte donc, dont l’oppression de l’univers live a été particulièrement fructueuse sur mon cerveau. Un show crescendo qui a fini en apothéose et qui me donne envie de revoir le groupe en live et en studio.

 

Je n’irai pas jusqu’à dire que The Prestige a été l’élément déterminant de ma venue ce samedi soir, mais depuis le temps que je veux les vivre en live, un nouvel échec n’aurait pas été pardonnable. De plus, cette soirée était également pour eux un synonyme de « fin » puisqu’il s’agissait du dernier concert dont la setlist serait basée sur leur excellent album Black Mouths, annonciateur donc d’une sortie ‘relativement’ imminente de son successeur enregistré chez Amaury Sauvé. On a d’ailleurs eu l’occasion d’entendre des extraits de cette future galette ce soir, et autant dire que des cordes furent grattés, des steaks furent envoyés et des poneys furent roxés. On a hâte.

On m’avait doucement prévenu que l’expérience The Prestige en live était assez intense et électrisante ; je ne peux qu’acquiescer armé de mon plus beau sourire et mon plus beau pouce en l’air. Si Alex (chant) à tendance à s’écarter un peu trop du micro à mon goût, force est de constater qu’il ne ménage pas son énergie pour étaler son grain corrosif tout en expulsant ses riffs les plus rock&roll de sa gratte. Les passages plus ambiants du groupe sont parfaitement sublimés en live, mais on restera sur ce sentiment puissant de rock&roll, ce groove qui ordonne à vos membres de s’articuler sans vous demander la permission et sur la maestria dont le quatuor fait preuve autant sur scène que sur cd. Hélas leur prestation est courte, beaucoup trop courte, à peine vingt cinq minutes si ma conscience du temps qui passe n’a pas été affecté. À ce moment là de la soirée j’ai déjà rattrapé toutes les malchances de la journée (dont je vous épargnerai l’énumération) et je suis donc une âme en paix. En paix mais qui bouillonne tout de même à l’idée de poser une oreille sur le prochain The Prestige. Ils représentent vraiment la classe à la française.

 

À peine dix minutes après la fin de ce concert assez intense, une histoire va se terminer, une histoire de onze ans va connaître son dénouement sous nos yeux. Après avoir repoussé la date plusieurs fois voici enfin le dernier concert du Dead Projet, qui s’en iront vaquer vers d’autres occupations, dans d’autres groupes probablement (ATELO/Phobia pour certains). Pas mal de gens avaient fait le déplacement pour cette occasion, cette dernière chance de se mettre sur la tronche sur les sons de Keep On Living, une dernière chance de prouver son amour pour le groupe dans une frénésie bestiale (on a entre autre vu les gratteux de Man is Not A Bird, The Rodeo Idiot Engine, l’homme derrière Un Automne de Plus, les Gazers etc…). Le temps de faire ses adieux à la scène est donc arrivé, et ce sera tout en beauté.

L’intensité de leur show, la puissance qu’ils dégagent et la ferveur avec laquelle le public s’est mû en un seul homme pour les soutenir les ont tout simplement transformé en tête d’affiche de la soirée. Il n’y avait plus de Raein, plus de The Prestige, plus de Gare XP, plus de Paris, plus de train, plus d’espace-temps, juste un groupe et son public en parfaite communion. La plupart des titres de Keep on Living (« Built To Spill », « Rotter Words, « The Beauty », « The Beast » etc..) seront joués, ainsi que quelques morceaux qui ne sont pas encore sorti sur support (dont un qui ferait apparemment l’objet d’une vidéo dans un futur proche). La mise en bière se déroule sous une pluie de confettis et aux sons des fans qui chantent les parties claires tous en choeur, une réelle communion vous dis-je. Même si certains n’étaient pas forcément venus pour eux ils n’ont pu que saluer non seulement leur performance, mais surtout l’intensité globale du show, les frissons, la fusion de deux mondes, lorsque le groupe et les fans ne font qu’un. Vraiment impressionnant.

Puis le moment fatidique arrive, le dernier morceau, « Keep On Living » bouclera la boucle dans un marasme général, slammeurs et mosheurs s’en donneront à cœur joie comme ils l’ont fait tout au long du concert (Flow le gratteux s’est même payé une séance de crowd surfing guitare en main). L’émotion est là tant chez le public que chez les membres du groupe qui s’enlacent, les ‘le dead projet est mort vive le dead projet’ retentissent, et nous tout ce qu’on attend c’est que l’on nous dise que tout cela n’était qu’une vaste farce, que le groupe continue, que des concerts il y en aura d’autres, que les vinyles à 5€ que nous avons dévalisé ne seront pas les vestiges d’une époque perdue dans une future proche….mais ce n’est pas le cas, c’est bel et bien fini.

Le Dead Projet est mort…vive le Dead Projet.

 

Hep hep hep mais où on va là ? avec tout ce flux d’émotions on en oublierait presque que le concert n’est pas fini. Venus des lointaines contrées d’Italie les screameurs de Raein viendront boucler la soirée en mettant une belle claque à l’ancienne, grâce à un son parfait, très très mélodique, des cris plaintifs à souhait et une réelle maitrise de l’émotion qu’ils dégagent. Pour ceux qui ne connaissaient pas, Raein est au screamo italien ce que Daitro est (était) au screamo en France, et honnêtement cela s’est grandement ressenti. Il n’est pas rare à l’occasion de concerts à grosse tête d’affiche, qu’une véritable scission se fasse entre les premières parties et le gros morceau, tant le charisme, la prestance et la présence de tel ou tel individu fait immédiatement la différence entre l’amateur et le professionnel. Ce soir pourtant niveau charisme on a tout de même eu affaire à du lourd, mais lorsque je les ai vu monté sur scène, j’ai eu cette sensation de classe inimitable, ce parfum de ‘on est les patrons’ (sans que cela se traduise par de la vantardise bien entendu) dans l’air.

Bref moi je suis un gros fan à la base et visiblement une bonne partie de la salle l’était, je ne suis hélas pas resté jusqu’à la fin à cause des transports en commun mais je pense tout de même avoir vu une bonne partie de la prestation (une grosse demie heure) et ce que j’ai vu m’a absolument ravi et m’a confirmé que Raein est un groupe de très grands qu’il se faut d’écouter. Pour vous dire le chant en italien ne m’a même pas fait sourciller (ceux en spoken words évidemment, pas les cris). Remercions encore Old Town Bicyclette pour cette belle date et la Gare XP pour mettre à disposition ce lieu de recueillement culturel autogéré.

Reagir a ce live report :