Deafheaven – « Sunbather »

- 24/06/13 19:06

DEAFHEAVEN

C’est en train de devenir le phénomène du moment et à juste titre, le premier « vrai » album de Deafheaven est en passe de remettre tout le monde à sa place. J’écris vrai entre guillemets parce que techniquement Roads to Judah n’est pas considéré comme un EP malgré ses uniques quatre pistes, et déjà à l’époque (2011) il avait fait terriblement mal. Sauf que Sunbather va dans la continuité de ce dernier tout en ayant un parti pris plus engagé et une vraie volonté d’aller au bout d’un concept, pour ne pas se contenter d’effleurer une idée (de génie).

Deafheaven c’est ce qu’on pourrait appeler la parfaite combinaison entre le post-rock et le black. Il y a de longs passages instrumentaux et même des pistes uniquement dédiées à cet art ; et il y a cette voix caverneuse typique de la musiques des contrées du nord, associée à une batterie bourrée de blasts de temps à autres, et qui place un peu le talent de Daniel Tracy. Dans des temps plus reculées ou chez des personnes qui ne sont pas familières des productions des saints franciscains, la combinaison peut paraître étrange, peu attrayante ou même provoquer une épilepsie passagère. Et histoire de troubler encore plus l’auditeur, le quintet nous pond un artwork coloré rose bonbon digne d’un nouvel opus de Beach House ou Glass Candy (NB : il a été fait par l’un des types de Touché Amoré).

Il suffira pourtant au tout venant pour succomber de prendre dix minutes de son temps à se plonger dans « Dream House », la piste introductive. Cette dernière a été élue chanson du mois de mai par Stereogum, et Sunbather meilleur nouvel album chez Pitchfork (qui mettent rarement le nez dans les musiques extrêmes mais qui quand ils le font le font bien). Je ne suis pas ce que l’on pourrait appeler un blackeux, je n’aime que le post metal teinté de black, et je ne suis encore qu’un pauvre novice en matière de post-rock ; pourtant j’ai la sensation d’avoir attendu cet album toute ma vie, j’ai l’impression d’être amoureux de lui, car je n’ai de cesse que de l’écouter, de le chérir et de tenter de le comprendre. Rarement j’ai autant réinterprété un opus, et si « Dream House » est bel et bien le facial promis, je ne peux me résigner à ne donner qu’une interprétation uniforme à la transcendante « Sunbather », l’incroyable tristesse décontenançante des « Please Remember » / « Windows » ou encore à l’agressivité salvatrice de « Pecan Tree ».

Il y a tellement d’émotions positives transportées dans leurs riffs, que toute la noirceur du monde réunie dans une voix black ne peut pas annuler ou ne serait-ce qu’égratigner l’espoir qui découle de cet album. Vivifiant, coloré, haletant mais aussi crispant, troublant et dérangeant, Sunbather nous pousse à nous interroger sur nous même et sur la musique, sur ce que l’on peut ressentir en tant qu’être humain face à ce qui se fait de plus sincère. Pendant une heure on voyage, pendant une heure on est ailleurs, pendant une heure on se sent bien, mais après une heure on se sent seul, alors on le réécoute, mais après deux heures on se sent de nouveau seul….

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