The Black Keys – « El Camino »

- 06/12/11 20:09

El Camino - Black keys

Dan et Patou remettent ça. Les très productifs Black Keys sont de retour un an et demi après Brothers, l’album de la consécration et de la renommée internationale. Brothers a marqué un tournant majeur dans la carrière des deux blueseux. Exit le blues noisy et le rock n’roll primaire des premiers albums, Brothers nous offrait un savant mélange de soul, de surf, de pop avec toujours cette petite dose garage, véritable identité sonore du duo. L’album avait été salué par la critique, le public et les publicitaires, la grande majorité des titres se retrouvant dans les spots de grandes enseignes, des génériques ou des bandes originales de films. Et revoilà Dan Auerbach et Patrick Carney avec un album enregistré à la maison, le bien nommé El Camino. En effet, il semble que les Black Keys suivent leur petit bonhomme de chemin sans se soucier du succès commercial ou des effets de mode. Dès l’artwork, avec ce bien joli van américain typique, on ne peut qu’être intrigué et l’envie de cliquer sur play se fait irrésistible.

Les premières notes d’El Camino prouvent que le duo est toujours prêt à nous surprendre. « Lonely Boy » résonne dans nos oreilles et reprend là ou Brothers s’était arrêté. Les synthés sont toujours de sortie, la composition est fine et poussée, le tout sur un rythme endiablé. En témoigne d’ailleurs le clip réalisé à la manière d’une vidéo virale et qui présente, dans son unique plan, un danseur plus très jeune mais toujours frénétique. Le ton est donné. On oscille donc entre des synthés « so sixties », des guitares toujours rugueuses et la voix inimitable de Dan. Toutefois cette première partie d’album se distingue par un tempo globalement plus envolé que son prédécesseur. Côté tubes, outre « Lonely Boy », il faudra compter sur « Run Right Back », « Nova Baby » ou « Gold On The Ceilling ». Et je suis déjà prêt à parier que les lignes de synthé ou de guitares seront reprises pour des spots publicitaires ou des films tant elles semblent avoir été écrites avec une vision cinématographique en tête. On imagine bien vite un film « tarantinesque » pour accompagner ce nouvel album comme ce fut le cas pour le clip de « Howlin’ For You » sur Brothers.

Les Black Keys continuent toutefois à « oser » avec le très pop rock « Little Back Submarine » qui cache, derrière ses airs de ballade folk, une montée en puissance rock d’une rare efficacité. Même lorsqu’un titre semble moins intéressant comme « Dead And Gone », il est sauvé par quelques notes de guitares, tenant plus du génie que du savoir faire, et un son à faire twister un ingénieur informaticien. Ainsi parmi les titres légèrement fades, il faudra compter sur « Sister » ou « Hell of a Season » qui, sans être mauvais, peinent à convaincre et ne restent pas gravés dans nos esprits. L’album a d’autres défauts. La qualité des titres ne suffit pas toujours à garder l’auditeur totalement attentif et il faut alors un petit quelque chose de synthé ou de guitare pour nous remettre sur les rails. Mais c’est peut être une bonne chose, l’esprit se repose parfois pendant un titre moins évident et on suppose que l’album livrera sa richesse globale sur le long terme.

On peut également regretter une batterie moins rageuse et créative, presque trop discrète qui nous fait oublier que le groupe est bien un duo. Il est vrai qu’entre les multiples pistes de synthés, de basse, de guitares, de batteries, de « hand clap », on imagine difficilement qu’il s’agit du même groupe qu’à ses débuts où seule la guitare et la batterie (et parfois une petite basse) avait droit de cité. El Camino se clôture par « Mind Eraser » et il semble en effet que la volonté du groupe est de nous faire doucement replonger vers notre quotidien, nous faire quitter cet album à la manière douce, nous le faire oublier jusqu’à ce que l’une de ses mélodies nous hante le crâne et nous force à le réécouter. On se retrouve ainsi sans s’en apercevoir dans un silence d’1 à 2 minutes avant d’émerger : Et oui l’album est fini et on reprend le cours normal des choses de la vie.

Cet album reprend donc la sauce Brothers et vu son incroyable succès on voit mal comment il aurait pu en être autrement néanmoins on ressent une réelle évolution. La guitare prend de nouveau le dessus sur les synthés avec des solos, toute fuzz enclenchée, dignes du doigté de Mr Auerbach mettant un terme à nos suspicions, oui, le son de Dan va encore susciter de longues discussions entres guitaristes pour tenter de se l’approprier. On notera aussi, côté nouveautés, le recours régulier à des chœurs ou encore à des synthés plus délicats par moments (plus proches du son de cloche que d’un orgue hammond). Finalement si Thickfreakness et les premiers succès du groupe semble s’éloigner un peu plus à chaque production, cet album semble une bonne alternative pour tous les fans des premiers albums qui se sentaient un peu perdus à l’écoute de Brothers. On sent un grand potentiel derrière cet album qui, s’il ne fera pas l’unanimité, relève allègrement le défi de succéder à Brothers. Sans être un chef d’œuvre, El Camino reste le « must have » de cette fin d’année.

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