Hopes Die Last – « Trust No One »

- 15/01/12 20:27

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Si Hopes Die Last faisait déjà parti de mes groupes favoris après leur premier EP Your Face Down Now ce n’est en aucun cas par hasard. J’ai su déceler chez eux cette sensation de bien-être incroyable que peu de groupes de post-hardcore peuvent me procurer. Une vraie personnalité dans les voix et des mélodies à la recherche de l’éveil émotionnel de l’auditeur. Si le screamer avait préféré abandonner le projet au profit d’un groupe au style douteux dont le nom transparent – Broken Heart College – m’avait suffit à passer outre, Hopes Die Last a sans contestation gagné au change en engageant Daniele Tofani, le charismatique nouveau go-to guy de la formation italienne. Ce n’est que récemment que je me suis lassé de leur premier full-length Six Years Home (2009), maitrisé et à la production très fine. C’est après presque deux ans et demi d’attente qu’ils nous donnent enfin la suite : Trust No One, que j’ai le plaisir de déguster en avant-première (s’il vous plait).

Le trident de l’excellence, c’est comme cela que je qualifierai les trois premières pistes pour ce qui restera probablement comme l’un des meilleurs départ d’album de post-hardcore de ces dernières années (avec le trio « This Is Usually The Part Where People Scream », « Goodbye Goodnight For Good » et « Seduction » d’Alesana sur Where Myth Fades to Legend). Deux des morceaux ont déjà fait l’objet de clips où leur titre était précédé d’un numéro (Chapter One et Chapter Two) qu’ils ont décidés d’inverser. La qualité de ces trois morceaux, même si ils reposent ouvertement sur le même système : couplet par Daniele, refrain en voix clair par Becko, break par Daniele puis bridge final par Becko; est tout bonnement impressionnante, d’un excellent groupe de post-hardcore ils viennent de se transformer en figure majeure de la scène. « Never Trust The Hazel Eyed » ouvre le bal assez fièrement et sans trop de fioritures, le temps de s’acclimater à la température des lieux, puis, on se laisse envahir par le scream de Daniele qui s’est considérablement amélioré, tant sur la technique que sur la force brute. Le second morceau, surement l’un des meilleurs que 2012 offrira, « Sidney Shown » fait également fi des progressions faites par le groupe, envolées maitrisées, jeu millimétré et une véritable aisance sur les voix qui empêchera quiconque de garder les pieds au sol. Un passage particulier m’a littéralement propulsé dans des méandres que seul la musique peut me faire accéder, cette voix tremblotante de Becko terminant le second refrain – particulièrement épique et frissonnant au passage – qui annonce inéluctablement l’immense break opéré par Daniele. Un moment si énorme et si intense que je ne peux l’écouter sans subir une transcendance kantienne. Enfin la troisième lame de ce trident est le premier morceau qui fut lâché par le groupe : « Unleash Hell » ; qui porte son nom avec magnificence et justesse. Le groupe avait eu la bonne idée de publier les lyrics en même temps que la vidéo, nous permettant de scander sans interruption les « I can’t see no reason why I am here tonight, I thought my life was better ». La musique jouée par HDL est substantielle, et si j’ai parlé de la satisfaction d’un Daniele à la hauteur des ambitions du groupe, il ne faut en aucun cas négliger Marco « Becko » Calanca, bassiste et vocaliste de génie, qui se joue de son timbre angélique sur chacun de ses passages, jamais il ne gaspillera de munitions, il ira toujours au cœur de sa musique, à l’essence même de nos pulsions animales, une voix capable de tant de choses on n’en voit pas si souvent.

Seulement restreindre l’opus à ces trois pistes seraient ridicule, même si ce sont elles qui donnent au matériel cet air de génie. Deux pistes dans le reste de ce deuxième effort sont d’influence electro, très succinctement pour l’interlude « The Blue » où on trempe à peine ses lèvres dans des résonances d’arrière-plan faisant – légèrement – penser à un départ de drop. L’autre est un featuring de Nesko avec qui ils avaient déjà travaillé sur le morceau « Here Comes Nero », cela ressemble plus à une piste bonus assez fun qu’à un véritable morceau mis en avant. Néanmoins si l’aventure venait à se renouveler j’aimerai une electro plus grasse et un peu moins propre. Niveau morceau bonus on peut également parler du cover de Katy Perry, décidément très en vogue chez les coreux, pour le morceau « Fireworks ».

La suite est tout aussi intéressante mais moins festive que le tout début d’album, plus tournée vers une tristesse à peine cachée ou vers une noirceur qui vous plonge dans les abysses de l’esprit de ses créateurs. Si « Life After Me Life After You » s’ambiance autour des variations vocales de ses deux frontmen, notamment la voix rocailleuse de Daniele, et est moins metalcore sur le fond sans en occulter la violence onirique des mélodies, des morceaux tel que « This Song Plays Suicide » font preuve d’une telle noirceur que l’on a peur à s’interroger sur l’évènement déclencheur d’une composition si ténébreuse. Le morceau porte bien son nom, il peut rappeler tellement de choses malheureuses que l’on se prend – non pas à se trancher la jugulaire – mais à s’étreindre de la mine basse des mauvais jours. Dans la continuité le groupe nous offre un piano/voix sur lequel viendra s’imprimer quelques scratchs pour meubler la sphère musicale, rien de mieux donc que ce « The Same Old Fears » planant et enivrant à la manière d’un « Consider me Alive » sur Six Years Home pour reprendre son souffle. « Icarus » viendra s’imposer comme le dernier coup d’éclat de l’album, et contrairement à son héros qui à vouloir voler trop près de l’astre solaire à fait fondre ses ailes de cires, l’écrasant inexorablement au sol rn métaphore de la raison terrassant la vanité, Hopes Die Last vise haut, mais ils peuvent se le permettre car ils en ont les capacités. À entendre ce morceau j’utiliserai l’expression anglophone « sky is the limit » tant son atmosphère m’empoigne, par un Daniele parfait, un Becko sur la même longueur d’onde, des violons qui vous berceront la nuit ou tout simplement le mélange parfait entre l’agressivité et la platitude.

Je suis pleinement heureux d’être sorti de cette immersion de trois jours les oreilles dans Trust No One, heureux également de voir que malgré leur projet parallèle Everland, les deux frontmen ont encore la tête à Hopes Die Last afin de nous délivrer une galette d’une qualité incroyable. Il est encore très tôt mais cet album fera probablement parti de mon top 5 des meilleurs de 2012. Plus on attend, plus le plaisir est grand, et cette fois-ci l’attente ne fût pas veine, alors tout le monde sort son porte-monnaie et dépense ses étrennes sur ce petit bijou.

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