Interview // Lost in Kiev Partie 1

- 22/08/12 17:45

 Lost In Kiev

À l’occasion de la sortie de leur premier album Motions le 27 août nous avons interviewé les parisiens de Lost in Kiev, ce sont des gens fascinants et on les remercie chaleureusement d’avoir pris le temps de répondre à nos questions. Vous pouvez également lire ici la chronique de leur album avant de lire cet interview en deux parties.

Tout d’abord bonjour à vous, pouvez-vous présenter rapidement ce qu’est Lost In Kiev.

Bonjour ! Lost In Kiev n’est pas une application ukrainienne de géolocalisation mais bien un groupe de post-rock situé à Paris. Le groupe s’est crée en 2007 et, après quelques mouvements de line-up, existe avec la formation actuelle depuis environ 2 ans.

Quelle est l’origine de votre nom ? Une anecdote croustillante ?

Ce nom est en effet lié à une anecdote, plus glaciale que torride par contre. Durant l’hiver 2009, Vincent, un des ex-guitaristes du groupe était parti rejoindre sa fiancée ukrainienne à Kiev. Une terrible tempête de neige l’avait obligé à décaler son retour sur Paris à une date indéterminée. On se retrouvait alors avec un guitariste « perdu à Kiev »… mais un nom définitif pour le groupe ! Même s’il a quitté Lost In Kiev depuis, nous sommes restés en très bon contact et c’est même Natalia, devenue sa femme, qui récite quelques mots en Ukrainien sur « > », l’intro de Motions.

Votre style de musique est assez difficile d’accès car très mélancolique et pas forcément à la portée de toute les âmes, comment définiriez vous ce que vous jouez ?

À l’origine, Lost In Kiev s’est formé autour du goût commun de ses créateurs pour une musique assez sombre et mélancolique. Avec les années et l’arrivée de nouveaux membres aux influences plus orientées post-hardcore (Tang, Amen-ra, Cult Of Luna, Daïtro…), le ton s’est même encore durci ! Nous assumons donc parfaitement d’évoluer dans une « niche » musicale et, à dire vrai, nous trouvons cela même assez confortable. C’est très agréable de faire partie d’une scène peuplée de connaisseurs avec lesquels nous avons pas mal de points communs. Par ailleurs, des concerts, comme celui que nous avons joué à Bordeaux par exemple l’année dernière, nous ont montré que notre musique n’était pas si opaque pour un public de « néophytes ». Nous avions reçu là-bas des réactions très positives de gens qui avaient simplement fait l’effort d’écouter notre musique sans en connaître les références.

Vous avez mis du temps avant de sortir votre premier album, avec notamment une petite démo, le rendu est très appliqué et très propre, était-ce la raison majeure de cette longue attente ?

Le délai de sortie de Motions par rapport à la création du groupe est dû principalement à 4 raisons :

1) Lost in Kiev est une vraie démocratie où chacun peut apporter sa pierre à l’édifice en phase de composition. C’est super agréable mais par contre cela peut générer de longs débats sur les structures et les arrangements ainsi que de nombreux essais en répète & sessions de bidouillages MAO. Ce processus a pu être parfois un peu laborieux mais nous essayons de l’améliorer afin que chaque membre puisse continuer à donner son avis sur les chansons. Il y a des groupes où le songwriting repose sur une seule personne, nous c’est tout le contraire, nous avons tous besoin d’apporter notre touche dans la musique de Lost In Kiev.

2) En bons fans de post-rock, nos titres durent autour de 7-8 minutes et comportent pas mal de couches de guitares et de sons de clavier. Nous avons donc essayé d’accorder une attention particulière à ce que les morceaux tiennent la distance et que l’auditeur ne les digère pas en une seule écoute. Tout cela demande forcément un peu de temps durant la composition.

3) Le turn-over. Pour un groupe « instrumental » dont la musique repose principalement sur les guitares, perdre 2 guitaristes à une année successive n’a pas été une mince affaire. Entre les périodes de recrutement des nouveaux membres, les phases d’apprentissage des anciens morceaux et la composition des nouveaux, de longs mois se sont déroulés sans que le groupe puisse véritablement trouver un rythme de croisière. Lost In Kiev s’est vraiment stabilisé après l’arrivée de Philippe à la guitare en septembre 2010. C’est d’ailleurs à partir de cette période que nous avons enchaîné les concerts afin de tester les morceaux en live avant la préparation de l’album.

4) Réaliser un album est un projet assez chronophage. Maxime, l’un de nos guitaristes, a assuré une grande partie des prises de son des instruments dans notre local de répétitions. Seule la batterie a été enregistrée dans un « véritable » studio. Après l’enregistrement, nous avons transféré les pistes à Sylvain Biguet pour le mixage puis enfin Dan Coutant s’est chargé du mastering. Au final, nous avons consacré notre premier semestre de l’année 2012 à la réalisation de l’album. Une aventure exigeante mais forcément très enrichissante !

Votre album s’appelle sobrement Motions, comment est-ce que ce mot représente votre musique ?

Durant la composition de l’album, les membres du groupe ont tous eu besoin de voyager pour des raisons d’ordre professionnel ou personnel. En y réfléchissant, nous nous sommes dits que notre musique représentait bien les différentes émotions que l’on peut ressentir avant, durant ou pendant un voyage : la joie de partir découvrir un nouvel environnement, le dilemme « rester ou partir » qui peut entraîner un conflit intérieur assez violent, la mélancolie des moments laissés derrière soi ou encore ce sentiment grisant de liberté qui survient à bord d’un avion ou d’un train, lorsqu’on se trouve entre deux mondes, entre deux vies… De fait, le mot « Motions » correspondait à ces deux idées : la notion de mouvements (« motions » en anglais) mais également le registre de l’émotion (« Un événement qui me touche » par exemple se traduit par «  An event that moves me »). En plus, nous préférons les titres en un seul mot… donc « Motions » faisait parfaitement l’affaire !

Dans l’un de vos morceaux (« The Day I Ruined My Life ») on entend pour la première fois de gros cris, le rendu est assez exceptionnel, racontez-nous l’histoire de ce morceau.

« The Day I Ruined My Life » est le dernier morceau de l’album mais également le dernier morceau à avoir été arrangé. Nous avons même bouclé in extremis ses arrangements lors de l’enregistrement de Motions. S’il a beaucoup évolué depuis sa première version, son final a, lui toujours existé sous cette forme assez apocalyptique avec son inexorable descente de tempo accompagnée de guitares assez massives. Dans ce morceau, un homme fait le bilan de la première partie de sa vie et évoque notamment un jour où un choix l’a conduit à trahir la confiance de son entourage et à vivre dans le mensonge depuis. À la fin du morceau, il prend conscience qu’il peut casser ce cycle autodestructeur en assumant ses erreurs passées et en stoppant sa fuite. C’est justement sur ce dernier passage où l’on entend des hurlements. L’idée d’ajouter un « véritable » chanteur sur ce passage nous est venue suite à notre concert au Klub en ouverture de Rosetta en juillet 2011. Nous avions demandé à son chanteur, Mike Armine, de faire une apparition en live sur un de nos morceaux, ce qu’il a gentiment accepté. Suite au concert, nous avons tellement été satisfaits du résultat que nous nous sommes dits qu’il fallait remettre ça sur l’album. C’est Olivier de Donkey Punch qui hurle sur la version de Motions et, franchement, ça envoie du bois ! Encore merci Olivier !

Pour l’album vous avez réenregistré deux pistes, à savoir « I’m Stuck » et « Under Close Surveillance » qui vous ont fait connaître (au moins pour moi), ce sont des morceaux auxquelles vous tenez particulièrement ? Que représentent-ils ?

« I’m Stuck » & « Under Close Surveillance » ont été composés avec les deux premiers guitaristes du groupe. Nous avons souhaité intégrer ces morceaux dans Motions car ils ont été légèrement réarrangés par rapport à leur version présente sur notre EP Hope, Fights & Disillusions. Nous avons de plus modifié les voix afin qu’elles soient en cohérence avec le thème global de Motions. Ces deux morceaux sont un peu les « classiques » de Lost In Kiev, ceux avec qui les gens ont pu nous découvrir et il nous paraissait logique de leur rendre un dernier « hommage » en les incluant à Motions.

Comment choisissez vous les samples de vos morceaux ? D’où les sortez vous, notamment les « does it get easier ? no » de « I’m Stuck »  ?

Avant Motions, nous sélectionnions des samples tirés de film ou de dialogues sur YouTube. Les samples que tu cites, ceux d’ « I’m Stuck », étaient par exemple issus du film Lost in Translation. Pour des raisons évidentes de droits mais également afin de proposer un album entièrement réalisé par Lost In Kiev, nous avons décidé d’écrire nous-mêmes les textes et de les faire enregistrer par des gens de notre entourage. Cela nous a permis à la fois de garder des samples en cohérence avec le thème de l’album (les voyages) et d’ajouter une dimension humaine, moins artificielle que de faire une récolte de samples sur Internet. Nous remercions d’ailleurs encore tous ceux qui ont interprété les samples, notamment Nizza (Telegun), Mathieu (Arms of Ra) et Vivien (Aléa).

Comment vous est venu cette passion des samples vocaux ? En écoutant des groupes de grindcore qui utilisent énormément de samples de films ?

Depuis sa création, Lost In Kiev a toujours été pensé comme un groupe « instrumental ». Les samples interviennent surtout comme des éléments d’ambiance que comme un palliatif au chant. Donc non, au risque de te décevoir, notre utilisation des samples ne vient pas de notre admiration pour Mortician ou Gronibard…

La suite demain..

Interview par Tommy


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