Bring Me The Horizon – Sempiternal

- 16/04/13 10:15

Sempiternal
La carrière d’un groupe, vu la conjoncture actuelle, n’est jamais quelque chose de tracée à l’avance. Nombres de groupes se voient rapidement adulés puis détestés, et retrouvent parfois leurs lettres de noblesse au moment où l’on s’y attend le moins. « Sans possession les sentiments sont plus purs » dit le maître philosophe de la nouvelle génération Orelsan, il n’a pas tort dans le sens où lorsqu’un groupe a atteint le pire niveau critique ou artistique de son parcours, il est alors libre de tenter l’impossible. Evidemment, Bring Me The Horizon n’a jamais encore atteint une telle impopularité, bien au contraire. Si ce There Is A Hell… en avait déconcerté plus d’un, le public du groupe s’était encore élargi grâce à des singles extrêmement efficaces

Une déclaration de Jona Weinhofen (parti depuis) en guise de cadeau de Noël 2011 qui nous balançait que le groupe écoutait Explosion In The Sky et que le post-rock influencerait surement ce nouvel opus. Les sceptiques y voyaient une nouvelle hype : le metalcore qui se la joue post-rock. Premier élément de réponse avec ce « Shadow Moses ». Les guitares sont moins présentes, le synthé s’incruste encore un peu plus que sur l’album précédent et… le refrain offre les premières lignes de chant clair d’Oli Sykes. Et ça passe plutôt crème. La machine est lancée, Sempiternal vaincra ou fera un flop. Avant toutes traces de second single, nous avons déjà l’album sur nos ordinateurs et c’est alors que l’on mesure la taille des testicules de ce groupe.

Dans une industrie où les cojones se mesurent aux nombres de cris et de tatouages, balancer ce « Can You Feel My Heart » en piste d’ouverture c’était mettre à genoux les haters. Surement la plus belle initiative de ce groupe. La chanson est planante, la batterie répétitive telle un sample, aucune trace de double pédale, la guitare se fait discrète et Oli chante. C’est écorché au possible, introspectif, les textes jouant à merveille la carte de l’antithèse. Ce pont presque pop où Sykes nous avoue ses difficultés à s’attacher, surement formaté par une jeunesse pervertie très tôt au mode de vie « Sex, drugs & Rock n Roll » imposé par les longues tournées du groupe. Une merveille.

Jordan Fish à l’électronique à « remplacé » Weinhofen à la gratte. Si bien que les chansons les plus énervées de l’album ont une nouvelle profondeur. Le couple gagnant « House Of Wolves » et « Empire » est composées de deux chansons plus hardcore que metal tant leur rythmique est soutenue, les gangs vocaux sur les refrains. Pourtant dans ces deux chansons on note la présence de ce clavier. Celui-là même qui rend cet « Empire » si profond émotionnellement.

Le nouveau BMTH a un coté pop non négligeable. Ce « Go To Hell For Heavens Sake » sonne comme si Linkin Park avait voulu devenir un groupe stylé avec de bonnes idées. Batterie tribale, couplet accompagné de simples notes de guitare donnant un coté très « héroïque » à la chanson. Oli sature sa voix nous rappelant Chester Bennigton. La production de Terry Date, responsable de Deftones, de Limp Bizkit entre autres, appuie ce coté moins kikoo-metalcore que l’album a. En effet, chaque chanson a son traitement sonore. Si le son de batterie reste cohérent du début à la fin, on sent que le producteur a insisté envers Nicholls pour qu’il limite au maximum les parties de doubles pédales. Ainsi, les breakdows se comptent sur les doigts d’une main et le batteur excelle alors dans l’élaboration de rythmes collant à l’atmosphère des chansons et non au style-étiquette entourant le groupe.

Pour moi, l’une des réussites de cet album est « Crooked Young ». Une chanson rappelant, il est vrai, « It Never Ends » par les notes de synthés mais pas que. Le titre est intense, Oli chante à plein poumon sa haine contre toutes formes de religion. Les éléments composant cette chanson sont nombreux, rendant le contenu extrêmement dense. Mais le gros plus reste cette fin absolument apocalyptique où les « Halelujah » se mélangeant aux « Fuck your Faith ! ».

L’album se conclut, comme tout bon album, par un chef d’œuvre. Je trouvais que le dernier Devil Sold His Soul présentait des similarités dans le chant avec BMTH et il faut croire que les rôles s’inversent parfois. Bring Me The Horizon compose, avec ce « Hospital For Souls » un morceau long, lent, progressif à souhait. Oli suit sa rédemption avec des paroles extrêmement personnelles. Très Devil Sold His Soul en somme. Les guitares se mélangeant parfaitement aux synthés pour donner ce coté bordeline à la chanson. Une illustration parfaite des récents problèmes d’addictions de Sykes.

Vous l’aurez compris, cet album frôle le chef d’œuvre. Frôle ? Oui parce qu’il est trop tôt pour évaluer la portée qu’il aura dans le temps. Ce qui est sur, c’est que si le groupe élève son niveau en live pour offrir des concerts aussi intenses que leurs albums, il faudra compter sur Bring Me The Horizon pour incarner le futur du metal. Car vu le talent que ces branleurs ont, même une colonie entière de haters ne pourra les arrêter.

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